Tous les articles par Philippe

Marylin

A propos de Go West !, Jim a émis hier un commentaire qui comportait des photographies. Pour des raisons techniques, les photographies ne peuvent être insérées dans les commentaires. Le sien est donc publié sous forme d’article. 

 

Depuis le début du récit, je le lis avec plaisir, une aventure bien américaine avec ses ingrédients indispensables, l’immensité et la diversité du territoire, la police, les truckers, un révolver, etc…, et Marilyn, la belle et fragile Marilyn que j’ai toujours aimée, pas seulement dans ses films et ses photo dans les magazines. Il y a trois portraits dessinés qui m’ont toujours interpellé. Le premier est le portrait peint par Andy Warhol. Le deuxième est l’affiche du film « Quand la ville dort » (The asphalt jungle) dans lequel elle joue un tout petit rôle de débutante et pourtant c’est elle qui tient la place prémonitoire de star sur l’affiche. Je ne connais pas l’origine du troisième mais il exprime parfaitement qui était Marilyn. Paix à son âme!

Go West ! (40)

Toute la L.A.’s Gate semblait me dire « C’est ici qu’on construit le monde ! C’est ici que ça se passe, mon vieux ! Ici, tout le monde est bronzé, tout le monde fait du sport, tout le monde travaille, tout le monde gagne de l’argent ! Alors ? Qu’est-ce que tu attends pour en faire autant ? »
Debout sous le soleil, les bras ballants au milieu de cette fourmilière bigarrée, pendant quelques instants, j’avais oublié Marylin. Mais la parenthèse insouciante s’est refermée quand sa voix est revenue : « Dans une heure, je serai morte. J’espère que Jack et Bobby pourriront en enfer. »

Oublier Marylin ! Je voudrais bien moi, mais comment faire ?

Marylin, Kennedy, Lawford, Clemmons… ces noms tournent dans ma tête. Et ces mots aussi « Dans une heure, je serai morte… je veux mourir parce que je ne veux plus passer ma vie à attendre… si tu continues à nous emmerder, tu vas en baver, ma cocotte ! … on aurait dit un gangster… que Jack et Bobby pourrissent en enfer ! » Et cette voix qui est enfermée dans ma poche…

Tout ça me dépasse. Je ne sais pas quoi faire. Je n’ose pas me demander ce qu’il faudrait faire ; je n’ose même pas poser le problème. Je n’ai plus envie de jouer, je ne veux plus être le privé redresseur de torts de la nuit dernière, je veux juste me retrouver avec cinq copains dans une Hudson à cinquante dollars sur la route de San Francisco. Je veux juste que rien de tout cela ne soit arrivé ; je n’ai pas aperçu Peter Lawford à travers une vitre de voiture de police, je n’ai pas ramassé le dictaphone, je n’ai jamais approché la maison de Marylin Monroe, je n’ai rien à voir avec tout ça.  Mais mon pauvre déni ne dure pas : j’ai vu Lawford, j’ai pris le dictaphone, j’ai écouté la cassette, Marylin est morte et je sais pourquoi. Je suis le seul à le savoir, le seul peut-être avec Peter Lawford.

A ce moment, me revient du fond de ma mémoire que Lawford Continuer la lecture de Go West ! (40)

C’est l’époque qui veut ça

Ce matin, au café de la rue de Vaugirard à l’heure du petit déjeuner, il y a treize consommateurs, douze femmes et un homme. On dirait le palmarès d’un festival de cinéma.
Anonyme

No snowflake in an avalanche ever feels responsible.
Anonymous 

Je pourrais tirer sur quelqu’un en pleine 5eme avenue, et je ne perdrais aucun électeur.
Donald Trump

L’Intelligence Artificielle ne parviendra jamais à éradiquer la Connerie Naturelle.
Anonyme 

L’instinct dicte le devoir et l’intelligence fournit les prétextes pour l’éluder.
Marcel Proust 

 

Deuxième lancement

Il y a exactement un mois sortait chez Amazon.fr mon dernier livre « Les trois premières fois et autres nouvelles optimistes »
Bon d’accord. Le lancement a été totalement raté. Trois exemplaires vendus en un mois — dont un à moi-même pour faire un cadeau — c’est un flop cruel et humiliant.
Mais ce n’est pas ça qui m’empêchera de lancer Les Trois premières fois une deuxième fois.

Alors voilà : Les trois premières fois et autres nouvelles optimistes, au cas où vous ne l’auriez pas compris, c’est un recueil de nouvelles optimistes, plutôt roses, enfin pas rose bonbon quand même, mais pas méchantes, pas comme celles du recueil précédent « Histoire de Noël et autres contes cruels » ou acides comme « Blind dinner »

« Les trois premières fois etc… » c’est d’abord « Les trois premières fois », une nouvelle en trois parties. La première des trois premières fois, c’est Franz Bauer qui raconte une première fois dans un refuge des Alpes autrichiennes. C’est une nouvelle d’initiation, écrite je l’espère dans le style de Thomas Mann ou de Joseph Conrad. Dans la deuxième des trois premières fois, carrément pastiche de P.G. Wodehouse, Bertram Fitzwarren, digne produit de l’Eton College, raconte une expérience très instructive vécue dans le quartier rouge d’Amsterdam. La dernière des trois premières, au style plus personnel, est moins légère, mais pas sombre pour autant.

 Les autres nouvelles du recueil parlent de Continuer la lecture de Deuxième lancement

Averses à La Flotte

Mercredi 3 avril : Pluie ininterrompue à La Flotte
par Lorenzo dell’Acqua

         Quand on ne joue ni aux cartes ni au scrabble, le mauvais temps à la mer oblige à se rabattre sur des activités solitaires. Cette semaine, j’ai lu un roman de Jean d’Ormesson dont le sous-titre aurait pu être : l’Eloge de la Futilité. Contrairement à ce qu’il dit avec une fausse modestie dont il est coutumier, ce livre ou plutôt cette autobiographie, Je dirai malgré tout que cette vie fut belle, est de loin son meilleur roman. Et il faut bien reconnaître que la réalité y dépasse la fiction. Cette constatation me perturbe un peu car il m’est devenu de plus en plus difficile de lire des ouvrages de fiction. Il me semble logique d’aimer les fictions quand on est jeune et que la vie s’offre à nous avec toutes ses possibilités. On y découvre alors les voies que l’on aimerait emprunter ou au contraire celles qui nous rebutent. Mais quand la vie est derrière nous, se plonger dans la fiction ne m’intéresse plus et me semble même absurde. A quoi revenir sur ce que nous n’avons pas réalisé ou su réaliser au cours de notre vie ? Aurais-je dû être un autre ? C’est le début de la dépression, à coup sûr !

         La lecture de ce livre de Jean d’O est troublante Continuer la lecture de Averses à La Flotte

Grand tourisme

Le poème qui suit a déjà été publié le 5 juillet 2018 sous le titre
 Les valises à roulettes.

Les achélèmes de Costa accostent au quai d’ Ostie.
Les réacteurs faciles encombrent da Vinci.
Le Grand Raccord Annulaire est pris en masse.
Les valises à roulettes ébranlent les pavés de Rome.

Couples âgés de touristes
cheveux blancs mais tenue de sport
ils sont encore en forme
et parcourent la ville en se tenant la main.

Touristes en troupeaux
derrière le parapluie rouge replié de leur guide
abrutis de fatigue, de pavés noirs et de culture
ils ingurgitent Auguste juste avant Michel-Ange
et confondent déjà le Colisée et le Capitole.

Jeunes gens en bandes, ou par deux Continuer la lecture de Grand tourisme

Go West ! (39)

(…)
« Santa Clarita, c’est bon pour toi ?
— C’est loin ?
— Environ trente miles vers le Nord.
— Formidable !
— Alors monte, mon gars ; on y va ! »
En démarrant, il ajoute : « Je suis Joe. Et toi ? ». Mais je ne réponds pas parce que sur le plancher, devant moi, il y a un journal. C’est le Los Angeles Times. J’ai les pieds dessus. On dirait une édition spéciale. Elle est pliée en deux, mais entre mes chaussures, je lis :
« MARYLIN MONROE DIES, BLAME PILLS »

C’est écrit en lettres capitales grasses. Le titre tient toute la page. Juste en dessous, on peut voir la partie haute d’une photographie. C’est un portrait. Il est coupé au niveau du front par la pliure du journal. On n’en voit qu’une chevelure blonde. Mais c’est bien elle ; c’est Marylin ! Et elle est morte. Pauvre fille, toujours si jolie, si innocente, si gaie dans ses films. En fermant les yeux, je la revois descendre cet escalier de « Sept ans de réflexion« , chanter dans ce wagon-lit de « Certains l’aiment chaud« . A l’instant, les mots qui me viennent à l’esprit pour la définir, c’est ‘’adorable… fragile’’… et maintenant ‘’morte’’. Comme je reste figé devant le journal, Joe me dit :
« Ah, tu as vu, Marylin est morte ! C’est triste, hein ? Une jolie fille comme ça ! »
—Je ne comprends pas « blame pills« . Qu’est que ça veut dire ? Continuer la lecture de Go West ! (39)

HISTOIRE DE DASHIELL STILLER (Extrait)

(…)
Bon, après ça, on a vécu des moments difficiles, Sammy et moi. J’avais plus de travail, plus de chambre, plus rien. Il a bien voulu que j’emménage avec lui dans sa chambre rue d’Odessa. La chambre était pas terrible, mais moi j’étais heureuse, vous pensez, toute la journée avec Sammy, à m’occuper de lui et tout ça. Mais au bout d’une semaine, il m’a dit que c’était pas tout ça, que c’était bien beau l’amour et l’eau fraiche, mais que ça manquait de beurre dans les épinards et qu’il allait falloir voir à me mettre au boulot. Quand j’ai compris que le boulot, c’était le ruban…

Le ruban ? Ben, c’est le trottoir, le turf, la racole… faire la pute, quoi ! Quand j’ai compris que c’était ça, j’ai refusé tout net. Alors il m’a flanqué une de ces roustes. J’étais une ingrate — une ingrate, c’est une moins que rien, une qu’a pas la reconnaissance du ventre, qu’il m’a dit — et qu’avec tous les sacrifices qu’il avait fait pour moi, il pensait que je pourrais bien faire ça pour lui, une fois de temps en temps. Quand j’ai dit « Jamais ! », il m’a flanqué une deuxième rouste et il m’a fichue dehors. Il ne voulait plus jamais me voir, même si je revenais en rampant. Ben, c’était pas vrai parce que, quand je suis revenue trois jours plus tard, Continuer la lecture de HISTOIRE DE DASHIELL STILLER (Extrait)

Go West ! (38)

Et puis partir au hasard de la bonne volonté des automobilistes, ça m’évitait temporairement d’avoir à choisir entre Seattle et Washington. Je verrais bien dans quelle direction le hasard m’entrainerait.
Comme je m’agitais sur mon matelas de carton pour rassembler mes affaires, je sentis quelque chose de dur dans une poche avant de mon jean. C’était le truc que j’avais ramassé sous la Rolls de Peter Lawford et que depuis, j’avais totalement oublié.

A peine plus long mais un peu plus étroit qu’un paquet de cigarettes, très compact, un peu lourd, avec sa petite fenêtre de plexiglass qui couvrait le logement de la cassette et son cordon tressé noir faisant office de gance, il dépassait à peine de ma main fermée. C’était un dictaphone de poche, en acier brossé gris, simple et élégant, le fruit de la technologie et du design allemands. Je le considérai tout d’abord avec hésitation, méfiance même, et puis je décidai d’écouter ce qu’il pouvait bien y avoir d’enregistré sur sa bande magnétique. Son maniement était simple et tout de suite j’ai entendu la voix. Elle disait : Continuer la lecture de Go West ! (38)