Archives mensuelles : février 2015

Une journée à la campagne (2)

La première partie de ce texte a été publiée hier, 27 Février

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La revue étant terminée, Grand-mère s’efface de la porte et dans la pénombre de la grande salle, nous apercevons les autres membres de la famille ; ils sont nombreux.

img031Les cousines affectueuses, curieuses de nos vêtements, nous prennent par la main. Les cousins, goguenards et intimidés, ne font aucun geste pour nous accueillir, raides dans leurs habits de dimanche, les sabots bien noirs, ils nous examinent longuement…

L’Oncle tourne son chapeau dans ses mains rugueuses. Une moustache humide s’approche de nos joues. Mille odeurs se superposent autour de lui : lait aigri, fromage, mêlées à celles du gilet à manches de grosse laine du pays et, surtout, relents de gros vin rouge.

Sur la longue table brune, Continuer la lecture de Une journée à la campagne (2)

Une journée à la campagne (1)

img522Marie Clémentine Rispal était née en 1893. Mariée à Louis Rieuf, elle avait eu trois enfants : Maho, Paul, et Line. Line était la maman de Sophie.
Cette « Journée à la campagne » s’est passée aux environs de 1900, dans la ferme de l’oncle de Marie Clémentine à Carlat dans le Cantal.
 C’est elle qui raconte.

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Au petit jour, la voiture fraichement lavée nous attend devant la porte. Bichette, la fringante jument, piaffe déjà d’impatience de retrouver le pré d’herbe tendre qu’elle saccage à sa guise.

Mal réveillés, mon frère et moi retrouvons nos places habituelles sur les banquettes arrière de la lourde voiture.

Mon père attend près de Bichette que toute la famille soit installée, les paniers casés entre nos jambes. Baptiste, sur le siège avant, l’air hilare, sa blouse grise toute propre et raide d’empois, fera partie de la famille, toute la journée, lui le solitaire, lui aussi est heureux.

Chacun bien à sa place, mon père, avec une surprenante agilité, saute sur le siège, les rennes en main, Continuer la lecture de Une journée à la campagne (1)

Textes des temps passés (modification)

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Né en 1945

Je suis comme toutes celles et ceux nés en 1945, un enfant de la guerre, et plus précisément, puisque je suis né à Paris, un enfant qui a dû sa naissance au Paris de l’Occupation. Les personnes qui ont vécu dans ce Paris-là ont voulu très vite l’oublier, ou bien ne se souvenir que de détails quotidiens, de ceux qui donnaient l’illusion qu’après tout la vie de chaque jour n’avait pas été si différente de celle qu’ils menaient en temps normal. Un mauvais rêve et aussi un vague remords d’avoir été en quelque sorte des survivants. Et lorsque leurs enfants les interrogeaient plus tard sur cette période et sur ce Paris-là, leurs réponses étaient évasives. Ou bien ils gardaient le silence comme s’ils voulaient rayer de leur mémoire ces années sombres et nous cacher quelque chose. Mais devant les silences de nos parents, nous avons tout deviné, comme si nous l’avions vécu.

 Extrait du discours prononcé par Patrick Modiano à Stockholm à l’occasion de la remise du Prix Nobel de littérature 2014

Birdman (Critique aisée 54)

Birdman    
d’Alejandro Gonalez Iñarritu, avec Michael Keaton et Edward Norton.

Drôle d’oiseau, drôle de film !

Moi, vous savez, je n’aime pas vraiment le théâtre. Sauf si c’est pour Feydeau, Shakespeare, et parfois pour Giraudoux, je n’aime pas beaucoup traverser Paris aux heures de pointe, ne trouver à me garer qu’au sixième sous-sol d’un parking qui sera sans ascenseur et à 21 minutes de marche du théâtre, brandir mes billets que j’ai dû imprimer chez moi par-dessus les têtes de mes semblables pour obtenir enfin de la boite à sel les numéros des sièges où je serai autorisé, après avoir soudoyé une ouvreuse,  à m’asseoir de travers sur un mauvais fauteuil d’où je verrai, les genoux enfoncés dans le dos de ma voisine de devant, une  scène coupée en deux par une colonne du XIXème siècle. (Vous voudrez bien noter que je n’ai rien dit de la pièce elle-même.)

Mais le cinéma, j’aime. Et le cinéma au carré, je veux dire le cinéma dans le cinéma, encore plus. Passionnants, ces films qui vous démontrent comment se fait un film, combien de personnes il faut écraser sur Sunset Boulevard pour arriver au sommet, comment on obtient Continuer la lecture de Birdman (Critique aisée 54)

American sniper (Critique aisée 53)

Critique aisee n°53

American sniper
de Clint Eastwood, avec Bradley Cooper
(Same player shoots again, and again, and again)

American Sniper n’est surement pas le meilleur film de Clint Eastwood réalisateur. Le meilleur reste pour moi sans conteste « Minuit dans le jardin du bien et du mal« . Pour autant, ce n’est pas son plus mauvais film. Ils sont plusieurs à concourir pour cette place et, parmi eux, « Firefox » et « Les pionniers de l’espace » tiennent la corde.

En tout cas, tel que c’est parti, c’est American Sniper qui rapportera le plus d’argent et peut-être même quelques Oscars * (budget 60 millions $, recettes 700 millions $, et ce n’est pas fini ).

L’américain sniper, c’est, dans Continuer la lecture de American sniper (Critique aisée 53)

Demain matin, lundi, 53ème critique aisée : American sniper
Et mardi matin, 54ème critique aisée : Birdman

Bonjour, Philippines ! Chap.2: Des méfaits de l’air conditionné

Si vous avez raté le Chapitre 1, cliquez ICI

Après un long voyage en compagnie d’André Ratinet, ingénieur et malchanceux, Philippe est arrivé à Manille de mauvaise humeur, agacé par l’enthousiasme permanent de son chef de mission et abasourdi par l’étrangeté du monde qui lui a sauté à la figure dès l’aéroport. Nous le retrouvons en milieu de matinée dans sa chambre du Blue Lagoon.

Malgré une fin de soirée plutôt agréable, la nuit n’a pas été bonne. Les six heures de décalage horaire, d’Ouest en Est de surcroit, y sont bien sûr pour quelque chose, mais il n’y a pas que ça : j’ai passé une bonne partie de ma nuit à me lever pour arrêter le climatiseur et obtenir le silence, et me relever pour le redémarrer dans la chaleur étouffante. Le vrai sommeil n’est venu qu’avec le lever du jour, et je me suis endormi, bercé par les borborygmes de l’appareil devenus familiers.

Réveillé vers dix heures, je ressens une sorte de sourde angoisse Continuer la lecture de Bonjour, Philippines ! Chap.2: Des méfaits de l’air conditionné