¿ TAVUSSA ? 39 – La Saint-Valentin en Floride

C’est dans une école de Parkland, Floride, que le nouveau massacre de la Saint-Valentin a eu lieu.
Dix-sept morts parmi les élèves et les professeurs
tués par un élève de 19 ans
avec une arme automatique
un AR-15
désigné dans l’armée comme le fusil d’assaut M16
acheté en toute légalité
par quelqu’un qui n’aurait même pas eu le droit de s’acheter une bière.

Quelques jours plus tard, le sénateur républicain Marco Rubio et la représentante de la National Riffle Association, Dana Loesch, sont venus à Parkland faire face à une assemblée d’élèves et de parents d’élèves.
CNN était là, bien sûr.

C’était émouvant de voir ces jeunes gens exprimer leur incompréhension et leur colère devant l’inaction des politiques depuis tant d’années, depuis tant de morts. C’était émouvant et en même temps dérisoire de les voir tenter d’arracher des promesses à ces deux personnages politiques expérimentés.
Émouvant et dérisoire.

C’était pathétique de voir le sénateur Rubio, qui fut candidat aux primaires républicaines, patauger dans les circonvolutions pour dire que ce massacre était désolant, qu’il n’aurait jamais dû arriver, que lui-même était pour toute loi qui renforcerait le contrôle psychologique préalable à l’achat d’une arme, mais que le strict contrôle des armes n’était pas la solution. C’était pathétique de le voir dix fois refuser de dire que désormais il n’accepterait plus d’argent de la NRA.
Pathétique et inquiétant.

C’était désolant de voir Madame Loesch, déclarer qu’étant que mère de famille elle-même, elle était tout aussi touchée par cet événement dramatique qu’une autre , puis reprendre presque dans les mêmes termes que le sénateur la litanie selon laquelle ce terrible évènement n’aurait jamais dû arriver et que la NRA était en faveur d’un renforcement du contrôle psychologique préalable à l’achat des armes.
Désolant et terrifiant.

Et tandis que se déroulaient ces débats sans espoir, tandis que l’on pouvait voir la calme colère de ces élèves et de ces parents, tandis que l’on pouvait constater la froide habileté dans la fausse compassion des politiques face à leurs accusateurs, pendant ce temps, les éléments de langage adéquats étaient distribués dans les milieux républicains, et ils étaient répétés à longueur d’interview à qui voulait ou ne voulait pas les entendre : ces jeunes gens qui interpellaient Rubio et Loesch, qui exigeaient d’eux des engagements, des actions, ceux-là n’étaient que des enfants, de stupides idéalistes, manipulés par la gauche et les partisans du contrôle des armes. Il n’était pas possible qu’ils s’expriment de cette façon si articulée, si calme, si volontaire. Des spécialistes leur avait donc dicté ce qu’ils disaient. Et d’ailleurs, comment auraient-ils pu avoir l’argent pour les bus qui les emmenaient vers les lieux de manifestation, si ce n’est par le lobby anti-armes ?

Et pendant ce temps-là, le Donald trouvait la solution pour empêcher les futurs massacres. Cette solution est composée pour le moment de trois dispositions.
-La première : interdire les dispositifs qui permettent de transformer une simple arme automatique en arme d’assaut.
-La deuxième : monter l’âge minimum légal pour acheter une arme à 18 ans.
-Et enfin, la troisième, particulièrement géniale : armer les professeurs.

Il y aurait beaucoup à dire, et surtout à ironiser, sur ces mesures. Mais cette chronique est déjà bien assez longue comme ça et je sens que vous vous lassez. Alors, je me limiterai aujourd’hui à quelques courtes observations sur la troisième mesure.
Armer les professeurs ?
-ce serait encore davantage d’armes en circulation,
-ce serait, aux dépens des écoles publiques et privées, une augmentation du chiffre d’affaire des fabriquant d’armes,
-et ce serait, j’ose à peine plaisanter, aussi une menace mortelle pour les cancres, chahuteurs et autres persécuteurs de profs.

Si vous avez encore une minute, laissez-moi vous donner quelques chiffres :
NRA : 4.300.000 membres et 202.000.000 $ en dons annuels.
USA : Entre 250 et 350.000.000 d’armes à feu, 5000 foires aux armes à feu par an.
Les USA représentent 4% de la population mondiale, mais les américains possèdent 30% des armes à feu existant dans le monde.
Aux USA, il y a eu 18 fusillades en milieu scolaire depuis le début de l’année, soit une tous les 3 jours.
Cela fait huit jours qu’il n’y en a pas eu.

7 réflexions sur « ¿ TAVUSSA ? 39 – La Saint-Valentin en Floride »

  1. Oui mais il doit y avoir armes et armes dans la stat. En France, je pense qu’il s’agit surtout de fusils de chasse (il serait d’ailleurs intéressant de connaître la statistique pour la Corse). Pour la Suisse, les armes de guerre détenues par les hommes à leur domicile pour servir en cas de mobilisation pour la défense du territoire (c’était le cas autrefois) ne doivent pas être comprises. En tout cas, les massacres de masse dans les écoles est bien un problème propre aux EU lié à la détention d’armes de guerre (et je crois aussi aux jeux vidéo) et pas qu’un problème de santé mentale des massacreurs comme veut le faire croire la NRA et le Russian colluded Trumpoiévitch ou Trumpoievsky.

  2. Pour info, voici le classement des pays en nombre d’armes pour 100 habitants

    1 Etats Unis 88,8
    2  Serbie 58,219
    3  Yemen 54,8
    4  Chypre 36,410
    5  Arabie saoudite 35
    6  Finlande 34,2
    7  Irak 34,2
    8  Uruguay 31,8
    9  Suède 31,6
    10  Norvège 31,3
    11  France 31,2
    12  Canada 30,8
    13  Autriche 30,4
    14  Islande 30,3
    15  Allemagne 30,3
    16  Oman 25,5
    17  Bahreïn 24,8
    18  Koweït 24,8
    19  Suisse 24,45

  3. Il faut en tout, savoir raison garder.

    « La Suisse compte parmi les pays les plus armés au monde proportionnellement à sa population. Malgré cet arsenal helvétique, les tueries comme celle de Las Vegas restent extrêmement rares. »

    Ce qui est excessif est insignifiant.

  4. Belle affaire pour la NRA, car c’est la meilleure des campagnes de promotion des armes à feu qu’elle pouvait imaginer .
    Quel prestige pour ces engins exposés constamment aux élèves par leurs maîtres, par définition « des exemples ».
    et :

    « Quand je serai grand, j’en veux une aussi ! », « Pour mon cadeau d’anniversaire, STP Papa… », …

  5. J’ai entendu l’autre jour un comique australien, Jim Jefferies, qui exerce aux USA faire dix ou quinze minutes sur les armes à feu aux USA. Il dit que souvent, à la sortie de ses spectacles, des gens viennent lui crier à la face :
    -You can’t change the second amendment !
    Sur scène, il répond :
    -Yes, you can ! It’ called an amendment.

  6. J’ai regardé aussi de bout en bout la retransmission sur CNN du “debat” (mot auquel CNN attachait beaucoup d’importance, d’autant plus qu’il en était derrière, et pas FOX News bien sûr) et je partage intégralement tout ce qu’en a écrit Philippe au-dessus. J’ajouterai tout de même: pathétique Amérique! Prisonnière de ses codes de bonne conduite, d’émotions contrôlées, dans ses débats aussi bien que dans revendications (les piquets de grève par les exemple: un cohorte disciplinée de grévistes qui tourne en rond devant l’usine ou le siège de l’entreprise concernée avec des pancartes qui expriment très poliment leurs revendications), et surtout, surtout, prisonnière de sa constitution vieille de quelques 230 ans et de ses amendements dont le célèbre 2ème qui autorise la détention d’armes par les citoyens, dont il n’est absolument pas question d’en changer un iota. Cet attachement à sa constitution d’origine est à la fois admirable et problématique car les EU à l’époque de sa rédaction étaient réduits à 13 états de la côte est. Pensez que dans le même laps de temps la France a connu 5 Républiques, un Consulat, 2 Empires, 2 types de Royauté, Et autant de constitutions! Et je ne compte pas les amendements. On en discute encore de nouveaux à apporter à l’heure actuelle. Le seul moment qui m’a semblé déstabiliser un peu l’arrogante représentante de la NRA dans le débat très policé d’hier est quand une enseignante d’histoire a rappelé trés sobrement la contradiction entre le préambule de la constitution et le 2ème amendement et surtout qu’à l’époque les armes nécessaires aux citoyens constitués en milices de défense étaient des mousquets, tirant un coup à la minute. J’aurais aimé et j’espère que le anti-armes americains limitent leur revendication de façon ferme, déterminée, bruyante et collective à une unique revendication qui serait l’abandon pur et simple de la vente libre d’armes d’assaut militaires. Les arguments des pro-armes et de la NRA sur le contrôle des achats engluent le débat pour ne rien faire de concret. Il serait temps que les revendicateurs américains apprennent nos façons de faire bien françaises du type ‘bonnets rouges’, ‘zadistes’, etc.

  7. Armer les enseignants : on a rarement entendu mesure plus stupide.

    D’un autre côté, on n’a jamais vu une arme tirer toute seule.

    Alors….?????

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