Suite africaine n°5 – Négociation à Bamako

Négociation à Bamako

Avenue de la République, Bamako
7 mai 1972, 9 heures du matin.

Deux hommes en caftan se font face.
L’un est assis sur un petit tabouret de bois sombre. Il est adossé au mur en terre cuite du Marché Rose.
L’autre se tient accroupi sur ses talons.
Les genoux des deux hommes se touchent et leurs mains aussi, mais on ne les voit pas car elles sont dissimulées  par une couverture aux rayures multicolores et aux tons passés qu’on a jetée sur elles.
Ils se regardent dans les yeux, immobiles et muets.
Parfois, la couverture est agitée de petites vagues ou de légers soubresauts, mais la plupart du temps sa surface reste calme.
L’homme adossé au mur est un marchand.
Celui qui lui fait face aussi.
L’un veut vendre et l’autre acheter.
Quoi?
Dix chèvres, deux balles de coton, une Peugeot 404, une femme ?
On ne sait pas.
Ils ne disent pas un mot, mais par leurs regards qui se croisent et leurs doigts qui se parlent, ils négocient.
Enfin, l’homme au tabouret replie la couverture tandis que l’autre se lève et s’époussette: ils sont maintenant d’accord sur un prix, qu’on ne connaîtra jamais.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *