Mon voisin du dessus

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L’homme est petit, étroit, précis, mais pas tout à fait ridicule. Ses traits sont assez fins, mais ils portent une expression pusillanime. Il approche de la cinquantaine, mais il a les cheveux presque blancs. Il porte des costumes gris clair et des cravates en laine marron foncé, ou des costumes marron clair et des cravates en laine marron foncé. Ses chaussures à lacets sont toujours luisantes. Ses horaires sont réguliers. Quand il m’arrive de le croiser dans l’escalier, il porte toujours une fine serviette en cuir jaune clair de très belle facture. Elle comporte un seul soufflet, mais aussi deux poches plaquées sur lesquelles viennent s’accrocher les boucles des deux sangles qui permettent de fixer le rabat. Après dix ans de carrière au Mans, il a été nommé à Paris et depuis cinq ans, il est mon voisin du dessus.

Hier, sur le quai de la Gare TGV du Mans, je l’ai aperçu qui attendait le même train que moi. J’ai fait semblant de ne pas le voir, et j’ai bien senti qu’il en faisait autant de son côté. Pendant de longues minutes, chacun a réussi à ne pas croiser le regard de l’autre, mais dans le train, il s’est trouvé que nos places réservées étaient côte à côte. Nous avons parfaitement joué la surprise d’abord et le plaisir ensuite. Nous avons parlé un peu du quartier, de notre immeuble et de nos autres voisins, puis la conversation est retombée. J’ai ouvert un dossier et lui un magazine syndical. Arrivés à la Gare Montparnasse, je lui ai proposé de le ramener en voiture. Je l’ai senti hésiter une seconde, mais il a finalement accepté. Le court trajet s’est effectué en silence.

Au moment où j’achevais de garer ma voiture devant notre immeuble, il m’a dit:

– Euh…, si ça ne vous ennuie pas, si vous voyez ma femme, euh…nous nous sommes rencontrés dans l’avion de Marseille…, j’étais en séminaire…

 

2 réflexions sur « Mon voisin du dessus »

  1. Je ne sais pas si la femme de mon voisin lit mon blog, mais qu’importe ! J’ai changé le nom de la gare et la couleur des cravates ! Bon, bien sûr, il y a mon nom en tête du journal…

  2. Vous m’aviez raconté cette anecdote quelques jours après, dès que nous nous sommes croisés au bureau.
    Je l’ai depuis racontée au moins une centaine de fois, à des amis, en famille, dans des rencontres professionnelles, déclenchant à chaque fois des rires. Peut-être que cela rappelait à certains des situations vécues (dans votre rôle, pas dans celui du voisin).
    Savez vous si la femme de votre voisin est abonnée au blog ?

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