Spotlight (Critique aisée n°69)

Spotlight
Tom McCarthy- 2015
Michael Keaton, Stanley Tucci, Mark Ruffalo, John Slattery

Spotlight est le nom d’une rubrique occasionnelle du grand journal de Boston, le Boston Globe. Les sujets de cette rubrique demandent souvent plusieurs mois d’enquête aux quatre journalistes permanents de ce service.

En 2001, sous l’impulsion d’un nouveau patron, Spotlight va s’intéresser au procès d’un prêtre pédophile. Son enquête va l’amener à découvrir que sur les vingt-cinq dernières années, plus de soixante-dix prêtres de la région de Boston ont été accusés de pédophilie, déplacés par l’archevêché sans que jamais aucun procès ne soit ouvert. L’équipe est prête à publier le résultat de ses investigations, mais le nouveau patron lui demande d’aller plus loin et de s’attaquer au système, c’est-à-dire prouver que chaque affaire de pédophilie était connue de l’archevêque de Boston, qu’il a couvert chacune d’entre elles  en négociant des arrangements financiers secrets avec les parents des victimes et en déplaçant les prêtres coupables dans un autres diocèse, où en général ils eurent tout loisir de récidiver.  La preuve sera rapportée et l’archevêque muté à Rome.

On ne peut voir ce film sans penser à Bas les masques de Richard Brooks ou aux Hommes du président , le film qu’Alan Pakula avait tiré de l’affaire du Watergate. Dans Spotlight, les journalistes ne luttent pas contre la puissance du Président des Etats-Unis, mais contre celle de l’Eglise catholique de Boston qui n’apparait pas du tout négligeable.

Le film de McCarthy n’est pas aussi tendu que celui de Pakula, mais il est extrêmement bien fait. Les acteurs n’ont pas le génie de Dustin Hoffman et de Robert Redford, mais ils sont presque tous excellents. Je vous recommande d’observer Stanley Tucci, qui joue le rôle d’un avocat d’origine arménienne. Tucci est l’un de ces acteurs de second rang qui donnent au cinéma américain toute sa solidité, son professionnalisme. Vous avez surement vu Tucci dans Margin Call, Le Diable s’habille en Prada ou Hunger Games. Je suis un peu plus réservé sur Mark Ruffalo, qui surjoue un peu trop en incarnant un jeune journaliste fonceur de Spotlight.

Le traitement du sujet des prêtres pédophiles est froid, sans passion no pathos, professionnel. Le film lui-même est sans rebondissement ni surprise, et l’on devine très rapidement la fin, même si on n’a jamais rien lu sur l’affaire du Cardinal Law, Archevêque de Boston. Ce qui est intéressant, c’est le travail d’investigation des journalistes, la façon dont leurs résultats  sont progressivement analysés, confirmés, approfondis par l’équipe du journal.

On peut voir ce film en toute confiance. On n’est pas déçu. Et si l’on croit à cette histoire, qui d’ailleurs est véridique, on se prend à envier les USA d’avoir un tel journalisme d’investigation, et puis on oublie et on retourne à notre presse nationale.

P.S.

Je viens d’écouter la critique du Masque et la Plume, encore plus favorable que la mienne sur ce film.

 

2 réflexions sur « Spotlight (Critique aisée n°69) »

  1. Tant que ces deux journalistes persisteront à choisir leur cible d’un seul côté, tant que l’un d’entre eux, au moins, continuera à être informé directement par le chef de cabinet de l’Elysée, et sans mettre en doute leurs qualités professionnelles, je persisterai, moi, à mettre en doute leur rigueur intellectuelle. Qu’ils aient cautionné (est-ce à dire apprécié ? ) le film de McCarthy n’est qu’un de preuve de cinéphilie, pas une preuve d’impartialité.
    Pour moi, il y aura toujours une grande différence entre journalisme d’investigation et journalisme engagé.

  2. Bel exemple de réalisme du bon journalisme, cautionné par Fabrice Lhomme et Gérard Davet , journaliste d’investigation du quotidien Le Monde, sur France Inter ( Philippe, désolée pour la provoc)

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