Les habitués (2)

Il y a une semaine, J-K Huysmans décrivait ici quelques habitués des cafés parisiens. Portraits réalistes et peu flatteurs de ses contemporains. Mais voici maintenant la description de l’Habitué intéressant.
Autoportrait ? 

(…) L’habitué intelligent, savant, exceptionnel, j’en conviens, celui dont je parle et le seul qui soit intéressant, par sa culture même, a besoin de se visiter, de s’asseoir en soi-même, de rester seul pendant quelques minutes, loin d’amis, s’il est célibataire ; loin de sa femme, s’il est marié. Cette distraction de sa vie, il la savoure dans une atmosphère quiète, sur une berge propice, dans ce café mort. D’autre part, ces gens sont visiblement des gens très bien élevés, mais ils n’aiment pas le monde. Leur tenue et un certain laisser aller le décèlent. La solution de l’énigme est peut-être là. Ces habitués trouvent une sorte de salon, mais un salon où l’on est pas forcé de s’habiller, de parler, de subir le bavardage exténuant des dames. Ils réalisent sans doute cet idéal de pouvoir songer et voyager en repos, au loin, dans le tiède milieu d’une convenable compagnie muette.

Joris-Karl Huysmans (1848-1907) 
Les Habitués de café (1889)

2 réflexions sur « Les habitués (2) »

  1. Il l’a savoure, non, bien sûr, Il la savoure, bien évidemment.
    Faute de frappe (typing error) du transcripteur, qui présente toutes ses excuses (apologies) à J.K.Huysmans que, pour un instant, il a fait passer aux yeux du monde pour un plouc (a perfect yokel).

  2. Très banal, ce texte d’Huysmans! Je ne l’ai guère savouré!

    Tout d’abord et en dépit du fait que je fasse rarement cas de la grammaire, (ayant été détesté de mes enseignants, je leur ai vomis leur grammaire avec ses règles et son jargon) je suis quand même surpris par la phrase: « cette distraction de sa vie, il l’a savoure… »!
    Fort de mes nombreuses lectures d’essais plus ou moins bien écrits et faible de celles des travaux plus mal que bien rédigés de mes étudiants, j’aurais plutôt écrit ‘il LA savoure’ ou encore, ‘back to the future,’ ‘il l’a savourÉE’)

    Mais, revenons à l’essentiel qui réside ni dans le style ni dans l’histoire mais dans les idées qui me viennent à l’esprit lorsque je lis un texte!

    Si je suis (du verbe suivre) Philippe suggérant qu’il s’agit là d’un autoportrait, ce texte illustre, selon un style Huysmansien, l’évidente banalité qui veut que chaque être humain se préfère à l’autre, dans la mesure où il a un accès, imparfait, certes, mais quand même très privilégié, à ce qu’il croit être sa propre pensée (‘a work for ever in progress’ donc en perpétuelle amélioration) alors qu’il n’appréhende des autres que leur apparence physique et l’expression palpable, reniflable, audible et visible de CE qu’ils semblent penser (au moment précis et donc arrêté de leur éphémère rencontre).

    L’absence de celles et ceux qui nous sont ‘proches’ (physiquement) nous évite d’avoir à prendre en compte ce qu’ils semblent manifester de la perception qu’ils ont de nous et que l’on sait perpétuellement insatisfaisante, puisqu’ils ne peuvent accéder au fond de notre pensée en progrès dès que leur écho sort de notre carte-écran-radar.

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